Demain, serai-je paysan?

Le forum départemental qui s’est tenu aujourd’hui à Seyssins, en lever de rideau de la quinzaine de l’installation en Isère, a donné un bon aperçu des obstacles que rencontre un jeune -ou moins jeune- aspirant agriculteur ayant l’intention de s’installer à la périphérie de l’agglomération grenobloise. Et l’objectif d’une installation pour deux départs fixé dans la charte départementale d’installation 2007-2012, signée à la foire de Beaucroissant, est très ambitieux dans un tel contexte.

Tous les acteurs de la politique agricole du département et les représentants des jeunes agriculteurs étaient mobilisés pour cette journée de débat consacrée à l’installation en milieu périurbain, ouverte par Catherine Brette, conseillère municipale de Seyssins et conseillère générale, en présence de Christian Nucci, conseiller général, Eliane Giraud, conseillère régionale, Jean-Pierre Destoille, directeur départemental de l’agriculture et de la forêt, Jérôme Crozat, président de l’ADASEA, Stéphane Vial, président des JA Isère, Eric Greffe Fonteymont, président du Conseil départemental d’installation.

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C’était le 14 septembre à la foire de Beaucroissant, la signature de la charte départementale d’installation 2007-2012 (archives sillon38.com)

La pression foncière n’a fait que s’accroître depuis quelques décennies, contribuant à raréfier les espaces en ZA. Et même si la SAFER joue son rôle structurel, contrôlant le foncier depuis les années 60, contrairement à d’autres pays d’Europe où le marché dicte sa loi, il arrive qu’un jeune se trouve face à des situations qui le dépassent.

Exemple: le cas de ce jeune homme, qui a témoigné lors de ce forum, porteur d’un projet agro-touristique avec production de céréales. Il trouve une offre de 9 ha sur le territoire de la commune de Seyssins. Mais quand on lui annonce le prix, 1 250 000 euros, il fait répéter son interlocuteur en pensant qu’il y a erreur sur les unités. Celui-ci lui répond que non, que le chiffre est le bon mais qu’il peut s’installer comme agriculteur et qu’il peut construire ensuite ce qu’il veut! Bref, une invitation à peine voilée à la spéculation immobilière.

Un cas qui n’a pas laissé indifférent M.Agresti, directeur de la SAFER: “La SAFER peut intervenir sur un tel dossier, utiliser son droit de préemption et demander la révision du prix. On peut souligner que, grâce à notre contrôle sur le long terme, nous arrivons à avoir des prix de 1 € à 1,20€/m2 sur la commune de Meylan”.

Autre exemple éloquent, exposé par Edwige Coissac, de l’ADASEA: celui de la colline du Mûrier, aux portes de Grenoble, sur les communes de Gières et Saint-Martin-d’Hères. Les communes concernées souhaitent, dans l’objectif d’avoir un paysage entretenu, accueillir une ou plusieurs activités agricoles. Une étude détaillée, toujours en cours, a évalué tous les éléments du dossier et élaboré quatre scénarios possibles. Mais les contraintes sont de taille: tout est en zone naturelle ce qui implique l’impossibilité de permis de construire, les parcelles sont en pente et une bonne partie du territoire se trouve en zone de risques majeurs. Un vrai casse-tête! Un jeune qui voudrait faire des cactus et autres plantes grasses sur un ha, ne pourrait même pas le faire car il a besoin de serres et pour cela, il faut un permis de construire.

Quelques réactions amères dans la salle. Thierry Blanchet, par exemple, agriculteur, ex JA, comme il le précise, puisqu’à 40 ans on n’est plus considéré comme tel et que l’on n’a plus droit à la DJA :”On a vraiment l’impression que l’on ne réserve aux jeunes agriculteurs que les terrains en pente, les coteaux, et que les terrains plats sont réservés à l’installation de grandes surfaces”.

A part ça, quelques raisons pour les JA de garder le moral: le pays voironnais, dont Thomas Borel (ADAYG) a brossé le portrait, fait figure de premier de la classe en matière de dynamisme et d’initiatives. On dénombre en effet 50 installations/an soutenues depuis 2000. Un résultat rendu possible grâce, notamment, au travail de fourmi de l’ADASEA, qui s’emploie à repérer les cédants et à les mettre en phase avec les postulants. Grâce, aussi, à la création de bâtiments relais qui permettent au jeune candidat de démarrer son activité en attendant de construire.

Pour conclure, on peut dire que malgré le soutien conséquent du Département (5 millions € consacrés à l’agriculture en 2007), malgré les outils législatifs existant pour maîtriser le territoire (SCOT, PLU, ZAP, PAEN, etc.), le poids de la pression foncière en zone périurbaine asphyxie l’agriculture et rend l’installation plus que problématique. Les candidats existent, pourtant. Ils étaient présents, en partie, à ce forum. Et, même si la moyenne d’âge des exploitants de l’Y grenoblois est de 52 ans, ils redoutent, chaque jour un peu plus, de se retrouver dans la peau de paysans sans terre.

Gilbert

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