Les cultures d’agrocarburants en question

Ce thème qui a constitué l’entrée en matière du cycle de conférences du festival de l’Albenc (le 5 septembre) , avec Fabrice Nicolino , auteur de “La faim, la bagnole, le blé et nous” et Pierre Bertrand, auteur de “Huile végétale, un vrai biocarburant”, est un sujet récurrent de débat. Dans sa question écrite publiée dans le JO Sénat du 19/06/2008 – page 1187, Mme Dominique Voynet (Seine Saint-Denis- SOC) attire l’attention de M. le ministre d’État, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire sur les recommandations établies dernièrement par l’OCDE relativement au développement des cultures dites de « biocarburants », que beaucoup ont pris l’habitude, dans un souci d’éviter toute confusion, de nommer pour ce qu’ils sont vraiment : des « agrocarburants ».

Selon l’objectif fixé par l’Union européenne aux pays membres, la France doit, d’ici 2020, atteindre un objectif de 10% de « biocarburants » dans les transports.

“Il apparaît de plus en plus nettement que cet objectif, par ailleurs difficile à tenir compte tenu de la concurrence accrue dans l’usage des sols entre cultures énergétiques et cultures alimentaires, met en péril la sécurité alimentaire de nombreux pays dans le monde. Ce risque est désormais largement reconnu par les experts. Quelques jours après le sommet de la FAO à Rome, le directeur pour l’agriculture de l’OCDE a ainsi plaidé pour « réduire drastiquement le soutien aux biocarburants ». C’est selon lui « la mesure la plus urgente à prendre pour enrayer la hausse spectaculaire des prix des matières premières agricoles ».

Elle lui demande de bien vouloir lui confirmer qu’il entend tenir compte de ces déclarations et de celles de nombreux experts internationaux et se prépare à réorienter, à court et moyen terme, la politique de la France en matière d’agrocarburants.

Réponse du Ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire publiée dans le JO Sénat du 04/09/2008 

La France s’est engagée dans un programme ambitieux de développement des biocarburants et met en oeuvre toute une série de mesures permettant d’encourager leur production et leur mise sur le marché. Ainsi, l’objectif d’incorporation de 5,75 % de biocarburants dans les carburants, initialement prévu pour 2010 par la directive 2003/30/CE, est avancé à 2008 et il est porté à 7 % en 2010 (en équivalence énergétique). Afin d’inciter à l’incorporation des biocarburants dans le gazole et les essences, les opérateurs (raffineurs, grandes surfaces et indépendants) qui mettent à la consommation des carburants contenant une proportion de biocarburants inférieure à un seuil minimal doivent acquitter, depuis la loi de finances pour 2005, un prélèvement supplémentaire de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP). Cette taxe, en étant très incitative, assure un marché pour les biocarburants produits.

En outre, l’exonération partielle de la taxe intérieure de consommation (TIC) permet de réduire le surcoût de fabrication des biocarburants par rapport aux carburants d’origine fossile. Le dispositif permet également d’assurer la traçabilité des biocarburants incorporés en France. La mise en oeuvre de ces deux systèmes a permis, à travers la publication de plusieurs appels à candidatures européens, l’agrément de 21 unités de production de biodiesel, 4 unités de production d’éthyle tertio butyl éther (ETBE) et 20 unités de production de bioéthanol en France, ce qui correspond à une production de plus de 3 millions de tonnes par an de biodiesel et plus de 1 million de tonnes par an de bioéthanol.

La défiscalisation partielle des biocarburants permet d’assurer la compétitivité de ces biocarburants par rapport aux carburants fossiles. Elle dépend des prix des produits pétroliers et des prix des matières premières agricoles utilisées pour la production de biocarburants. Elle est fixée chaque année en loi de finances pour l’année suivante.

Toutefois, comme l’ont montré les débats lors du Grenelle de l’environnement, les biocarburants doivent faire la preuve de leur performance énergétique et environnementale. Un groupe de travail a donc été mis en place, comprenant notamment l’Institut français du pétrole (IFP), l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) ainsi que les services de l’État compétents, afin de réaliser une analyse critique et une actualisation des études existantes portant sur les bilans énergétiques et environnementaux des biocarburants de première génération.

Simultanément, le Président de la République a précisé que la politique de soutien aux biocarburants devait être poursuivie sans remettre en cause les engagements pris, tout en indiquant que la priorité devait être donnée au développement des biocarburants de deuxième génération, plus pertinents face aux défis environnementaux et énergétiques et qui permettront d’éviter la concurrence avec les productions à des fins alimentaires. C’est à l’issue de ces travaux, et en prenant en compte les autres composantes de la politique française de soutien en faveur des biocarburants comme la valorisation de notre potentiel agricole ou leur contribution à notre indépendance énergétique, que devront être examinés les paramètres du plan biocarburants français.

Gilbert

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