L’Oisans, c’est aussi l’agriculture

Si le tourisme est depuis un demi-siècle le poumon économique de l’Oisans, hiver comme été, l’agriculture, elle, était, encore très récemment (au siècle dernier, néanmoins), à bout de souffle :

« Il y a eu un gros creux, il y a une quinzaine d’années, à l’échelle du canton , époque  où le nombre d’agriculteurs est tombé à une dizaine », souligne Manuelle Glasmann, animatrice Oisans à la Chambre d’Agriculture de l’Isère. « La situation a évolué positivement  : on recense aujourd’hui approximativement 25 producteurs (1), d’ une moyenne d’âge de 40 ans, soit en dessous de la moyenne nationale, et une dizaine de projets d’installation sont à l’étude, portés par des jeunes de l’Oisans ».

Ce nouvel élan est sans aucun doute à mettre à l’actif de l’APAO (association des producteurs agricoles de l’Oisans) qui s’emploie activement à ce que l’agriculture trouve sa place en Oisans, à faire connaître ses acteurs aux habitants de ces vallées, à valoriser leur production.

miel Riche
L'apiculture à Villar-d'Arène (photo Famille Riche)

Une offre de produits de qualité comme celle-ci ne peut que trouver son public et  prendre de la valeur : les consommateurs, qu’ils soient d’ici ou d’ailleurs, n’ont jamais autant été demandeurs. Les produits fermiers, la cuisine de pays, les saveurs de terroir, ils aiment ! Ajoutons que tous  ces produits, il est possible de les retrouver aussi sur les tables des chambres d’hôtes et gîtes ruraux de Bourg d’Oisans et alentour, accommodés et mitonnés comme savent le faire les gens du pays. L’accueil y est à la mesure de la saveur des plats qui vous seront servis.

« La demande est là, c’est un fait, confirme Manuelle Glasman. Et les producteurs ne peuvent y répondre complètement. Près de 90% de la production sont écoulés en vente directe, sur les marchés (2), à la ferme ou via les AMAP de Grenoble ».

Outre la vente à la ferme et sur le marché, d’autres points de vente sont en projet. Pour l’été 2010, un magasin de producteurs devrait ouvrir ses portes au Sonnant d’Uriage, commune d’Uriage, en bordure de la route qui conduit à Chamrousse et Bourg d’Oisans et à 30 minutes de l’agglomération grenobloise. Une route qui connaît un trafic considérable, été comme hiver.

« Ce projet, sur lequel nous travaillons depuis deux ans, confie Olivier Hugonnard, président de l’APAO, a pu aboutir grâce à un co-financement  CDRA Alpes Sud Isère/CDRA du Grésivaudan ».

Le plus petit abattoir certifié CE

Cette année 2010 qui sera riche en projets et en actions, a démarré dans les meilleures conditions. L’abattoir de Bourg d’Oisans a obtenu l’agrément CE il y a deux mois. Ce qui fait la fierté d’Olivier : « Oui, c’est une satisfaction . C’est pour nous un équipement essentiel, pour lequel nous avons fait de gros investissements avec l’aide du SIVOM. L’abattoir, géré en SARL par les éleveurs de l’Oisans, est l’un des plus petits abattoirs de France agréé CE ».

Le troupeau d'Emilie Salvi à Ornon (photo Emilie Salvi)
Le troupeau d'Emilie Salvi à Ornon (photo Emilie Salvi)

Jusque là, l’abattoir ne pouvait vendre la viande en direct que dans un périmètre restreint. Avec l’estampille CE, il est désormais possible de vendre les bêtes abattues et découpées à des structures revendeuses comme des restaurants et des cantines. Cet agrément, donné provisoirement, devra être confirmé par la préfecture vers la fin mars.

Ajoutons que cet agrément modifie les règles de travail du personnel de l’abattoir, la mise aux normes impliquant  l’ enregistrement systématique des pratiques (méthode HACCP) dans l’objectif de garantir la sécurité sanitaire des aliments.

Valoriser, promouvoir, communiquer

La vocation agricole de l’Oisans (4) s’est peu à peu effilochée au fil des siècles et le défi de l’APAO avec le soutien des élus, est précisément de lui redonner vie, de la mettre en lumière. L’une des priorités a été la valorisation. L’APAO (3), dont les membres font partie du réseau « Bienvenue à la ferme », a élaboré une charte de qualité et une marque qui  font sa force : animaux élevés en Oisans,découpe à l’abattoir de Bourg-d’Oisans, fromages, miel, charcuterie  transformés à la ferme. 100% Oisans.

Mais le savoir-faire a besoin du faire savoir. En complément, l’association affiche la volonté d’engager une véritable communication sur ce sujet : réalisation d’un bulletin, création d’une signalétique, expo photo, etc.

« La cible, précise Manuelle Glasman, c’est avant tout les gens de l’Oisans. Il y a des jeunes à Bourg d’Oisans qui ignorent que des agriculteurs travaillent pas loin de chez eux ou un peu plus haut. L’objectif est d’ancrer l’agriculture dans la vie locale, qu’elle soit connue et reconnue par les habitants »

Pour atteindre cet objectif, il faut une mobilisation collective. C’est pourquoi l’APAO , au cours de cette année 2010, souhaite développer des partenariats et des collaborations, que ce soit avec l’Office de tourisme (création d’un document sur la route des savoir-faire »,  le Parc des Ecrins, le SIVOM, la Communauté de communes.

Une dizaine de porteurs de projets d’installation

Outre son action en faveur d’une gestion équilibrée de l’espace et de la valorisation des produits, l’APAO, en liaison avec les élus, soutient l’installation des agriculteurs. Une démarche qui n’est pas toujours simple, en Oisans comme ailleurs, en particulier pour trouver des terres agricoles.

« Des terres en friches, il y en a, dans la plaine de la Romanche. Et ce sont des terres fertiles. Mais il est extrêmement difficile d’avoir un bail, explique Olivier Hugonnard. Les propriétaires ne sont pas disposés ».

L’APAO participe à des projets  avec les élus et la profession agricole afin de faciliter l’installation sur son territoire.

« Nous avons le soutien des élus, notamment de la Com Com mais il devient nécessaire de passer du soutien à la collaboration, explique Manuelle Glasman. Il faut voir comment le territoire peut faire une place à cette agriculture. Il y a par exemple une forte demande de maraîchage. Où trouver de la place ? L’aménagement de la Romanche, qui entraîne l’interdiction de construire tout bâtiment  ne facilite pas les choses ».

Le SYMBHI, conduit ici, comme en Isère Amont, des travaux de protection contre les crues. La circulation le long des digues, entre autres, pose de gros problèmes aux agriculteurs, les barrières et portiques en place ne permettant pas aux engins agricoles de passer.

L’ADASEA  recense près de 13 candidats à l’installation , la plupart de l’ Oisans, hommes et femmes, porteurs de projets diversifiés qui vont de l’apiculture aux PPAM en passant par les vaches laitières, les ovins, caprins, les  volailles, les fromages, et la création d’une ferme équestre. L’APAO compte sur ces nouveaux arrivants pour poursuivre son défi, à savoir que l’agriculture relève la tête en Oisans. Toute nouvelle bouffée d’oxygène est la bienvenue. Mais elle compte de la même façon sur les élus pour leur faire une place.

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(1) Quelques producteurs de l’Oisans  (liste non ehxaustive)

Chantal Theysset, (Villard-Reymond)- liqueurs et apéritifs (génépi, gentiane, sureau)  confitures (framboises, cassis, groseilles) (voir la photo de une, de Chantal Theysset)

La famille Salvi, (Ornon) viande d’agneau, de veau et de bœuf

Olivier Hugonnard  (Bourg d’Oisans) fromages de chèvres,  chevreau

Emilie Salvi (Ornon) – fromages de brebis, viande d’ agneau

Marie-Anne Varreau (Venosc)- miel de montagne et haute montagne

Didier Girard (Bourg d’Oisans), viande de bison et d’ agneau d’alpage

Joël et Karine Ganot, (Bourg d’Oisans),charcuterie, viande d’agneau, de bœuf charolais et limousin, veau de lait et  porc fermier

Cécile Strauss (Allemont)-  fromages de chèvres,chevreau

Lydie Barruel  (Bourg d’Oisans) – légumes, œufs et produits de la ferme Stéphane Vieux Bourg d’Oisans) – bœuf, veau, pommes de terre)

Julien Picca (Bourg d’Oisans) -bœuf, mouton

Jérôme Fouvet et Véronique Riche  (Villar d’Arène) – miel et ses produits dérivés

Frédéric et Claudine Laperrière (Villar d’Arène) – tommes, raclette et gruyères d’alpage.

(2) Le marché de Bourg-d’Oisans a lieu le samedi matin. Certains producteurs sont aussi présents sur des marchés grenoblois comme le marché du vendredi, place aux Herbes ou le samedi, place Saint-André.

(3) L’APAO tiendra son assemblée générale lundi 8 mars à 19h30 à la mairie de Bourg d’Oisans.

(4) C’est à l’Oisans que nous devons la foire de Beaucroissant. Une catastrophe est à l’origine de ce transfert vers la Bièvre. En 1219, le lac naturel de Saint-Laurent (à l’emplacement de l’actuel Bourg d’Oisans) se rompt et inonde toute la vallée y compris Grenoble. On déplore de très nombreuses victimes.

Dès l’année suivante, le 14 septembre, sous la conduite de Pierre de Seyssins, évêque de Grenoble, la foule des survivants se rend en pèlerinage à Parménie, résidence de l’évêque. Les pèlerins viennent remercier le ciel de les avoir épargnés. Ils sont si nombreux qu’il faut construire au pied de la colline un village pour les abriter. Il est installé au lieu-dit “Le Mollard du Paul” avant de prendre le nom de Beaucroissant en 1312 par décision de Guy de Tullins, seigneur des lieux. Ce rassemblement est l’occasion de faire du commerce et les marchands suivent en nombre. La foire de Beaucroissant est née.

Gilbert

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