Apprendre aux vaches à pâturer dans la pente

Dans les alpages, certaines vaches sont capables de grimper de très fortes pentes. Si la race des animaux explique une partie de ces habiletés, l’éducation donnée par l’éleveur semble également déterminante. Michel Meuret, directeur de recherche à l’ Inra d’Avignon nous parle des travaux que mène son équipe en partenariat avec le CNRS de Lyon et le Parc naturel régional du Massif des Bauges.

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(Photo Fédération des alpages de l’Isère)

 

Pourquoi chercher à faire pâturer des terrains pentus et accidentés ?


Dans la plupart des élevages français, le pâturage des vaches reste généralement limité à des prairies peu pentues, sans broussailles et faciles à exploiter. Dans les Bauges (Savoie et Haute-Savoie), les flancs de montagne sont également utilisés comme pâturage pour les génisses et les vaches laitières. Principale justification à cette pratique : la priorité donnée à la production de foin sur terrains peu pentus, pour les 6 mois d’hiver passés à l’étable, oblige à faire pâturer les surfaces d’accès plus difficile.

Par ailleurs, sur un plan qualitatif, le cahier des charges du fromage d’appellation d’origine contrôlée (AOC) Tome des Bauges limite l’usage des aliments concentrés, ce qui devrait inciter les éleveurs à utiliser les ressources fourragères locales et notamment à étendre les aires de pâturage aux terrains d’altitude. Enfin, les politiques publiques agrienvironnementales encouragent financièrement le pâturage afin de mieux contrôler les excès d’embroussaillement et donc préserver la biodiversité des milieux.

L’aptitude à pâturer en montagne est-elle innée ou acquise ?

La race des vaches, issues d’un long processus de sélection, détermine en théorie l’aptitude à pâturer en montagne. Dans les Bauges, trois races laitières sont élevées, plus ou moins productives en lait et plus ou moins réputées pour leurs capacités d’adaptation à la vie en alpage : la Montbéliarde, l’Abondance et la Tarine. Or, en alpage, mais aussi en collines, c’est l’aptitude à la marche qui conditionne beaucoup la performance laitière.

Des génisses de race Tarine (ou Tarentaise) sont très habiles pour grimper et brouter sur des pâturages d’alpage dont les pentes avoisinent souvent 40 %, ce qui est exceptionnel pour des bovins (alpage du massif des Bauges, Savoie).

Si la capacité à circuler et brouter dans les pentes dépend en partie de la race des animaux, des éleveurs estiment que l’apprentissage aux pentes est primordial, et ce, dès le jeune âge de l’animal. Par observations répétées, ils ont pu constater que des animaux de même race que les leurs, mais achetés en plaine et déjà adultes, parvenaient difficilement à pâturer dans les pentes. Pour certains, la démarche passe par une éducation précoce, à organiser soigneusement. Pour d’autres, l’apprentissage se fait spontanément, du fait de l’obligation de conduire les génisses sur les terrains les plus pentus afin de garder les parcelles moins pentues pour la production de foin ou la traite des vaches laitières.

Comment se déroule l’éducation des jeunes animaux ?

En pratique, des éleveurs habituent leurs veaux dès l’âge de 6 à 8 mois à des terrains pentus. Ils les conduisent dès leur première sortie dans des parcs d’apprentissage qui incluent selon les méthodes soit un terrain varié formé de plat, de côtes, de pré et de bosquets, pour habituer le veau à un terrain irrégulier, soit un talus raide où les veaux, entrés le matin par le bas du pré, doivent rejoindre l’abreuvoir placé sur une partie plate en haut du terrain.

Plus tard, les génisses de 2 ans sont menées au printemps et à l’automne sur des coteaux pentus (30% en moyenne), embroussaillés voire boisés. Durant l’été, il s’agit d’un alpage à génisses, où les fortes pentes (45% en moyenne) ne permettent pas l’accès du tracteur pour la traite des vaches laitières mais où le mélange des jeunes génisses avec celles de 3 ans, déjà plus expérimentées, favorise un échange et un apprentissage social au sein du troupeau.

Gilbert

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