Le génome du colza séquencé

Inflorescence de colza. © CAIN Anne-Hélène

Un consortium international d’une trentaine d’instituts de recherche, piloté par l’Inra et le CEA (Genoscope) et associant le CNRS et l’université d’Evry, vient de rendre publique la séquence de référence du génome complet du colza.

Cette première mondiale ouvre la voie à la compréhension fondamentale des génomes complexes polyploïdes (associant plusieurs sous-génomes), ainsi qu’à l’amélioration variétale du colza, une grande culture récente1 en pleine expansion et à fort potentiel d’amélioration.

Une première mondiale

Dans le cadre du projet Seq-Poly-Nap, financé principalement par l’Agence nationale de la recherche (ANR), des chercheurs de l’Inra, du CEA (Genoscope), du CNRS, de l’Université d’Evry, en collaboration avec leurs collègues étrangers, ont produit la séquence de référence du génome du colza ainsi que celle d’une collection de variétés représentant la diversité de cette espèce.

Une séquence de référence constitue la séquence assemblée et ordonnée de tous les gènes. La principale difficulté dans le cas du colza a été de séquencer les deux sous-génomes et de les distinguer. Ceci a été rendu possible par la mise au point d’une stratégie originale de séquençage, le développement d’outils bioinformatiques et d’analyse de l’expression des gènes dupliqués et de leur régulation.

C’est la première fois qu’un génome polyploïde récent est séquencé dans son intégralité et comparé à ceux de ses espèces parentales, le chou et la navette (dont l’Inra a également contribué aux déchiffrages récents).

Le colza: champion des duplications récurrentes des génomes par polyploïdie

Les chercheurs montrent qu’au-delà de l’hybridation post-néolithique ayant conduit à sa formation, le colza aurait accumulé au cours de son évolution 72 génomes ancestraux, résultat de nombreux cycles de polyploïdisation, faisant de son génome un des plus hautement dupliqués chez les plantes à fleurs (angiospermes).

Ce phénomène récurrent, suivi par des restructurations du génome, a conduit à l’accumulation d’un grand nombre de gènes, soit plus de 101 000. Un nombre plus de quatre fois plus important que les 20 000-25 000 gènes de l’Homme par exemple.

Une cohabitation et un « dialogue » subtils entre les sous-génomes et gènes dupliqués

Les chercheurs ont observé que la grande majorité des gènes du colza sont dupliqués, existant donc en deux copies à séquences proches ou quasi-identiques. La quasi-totalité de ces gènes dupliqués sont exprimés ; pour un même gène, les deux copies participent conjointement à leur fonction.

Les chercheurs suggèrent que ces gènes dupliqués confèrent un réservoir important de diversification, d’adaptation et d’amélioration; la fonction principale étant régie par une copie des gènes dupliqués, la deuxième copie peut se restructurer et muter pour l’émergence de nouvelle fonction.

Le dialogue se traduit également par des échanges de gènes et d’ADN entre les deux sous-génomes du colza. Ainsi, pour un gène dupliqué, normalement présent sur les deux sous-génomes, une copie peut être remplacée par la séquence de la deuxième copie du second sous-génome. Le mécanisme d’échange à l’œuvre ainsi que son avantage sélectif restent encore à déterminer, bien qu’il ait déjà été montré que ce phénomène conduit à une diversification.

Une ressource unique pour l’amélioration variétale du colza

Le colza est une espèce cultivée à grande échelle depuis peu, à laquelle il reste un fort potentiel d’amélioration génétique. Ainsi le séquençage de son génome constitue une ressource unique au monde car il ouvre de nouvelles potentialités pour l’identification des gènes d’intérêt agronomique et leur utilisation rapide dans les programmes de sélection variétale.

Il serait par exemple possible d’améliorer la teneur et la composition en huile, la résistance à des pathogènes, la tolérance au froid, le rendement, ou encore l’efficacité d’utilisation des nitrates dans le sol.

De nombreux projets exploitant cette ressource pour une agriculture durable sont en cours, notamment à l’Inra.

1 L’apparition du colza est considérée comme « récente », c’est-à-dire qu’elle remonte à l’ère post-néolithique, soit environ 5 500 ans avant notre ère

Référence
Chalhoub et al. Early allopolyploid evolution in the post-Neolithic Brassica napus oilseed genome. Science, 22 août 2014. DOI: 10.1126/science.1253435

Gilbert

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