Traitement des eaux usées: l’Isère patauge!

La directive du 23 octobre 2000, appelée «directive cadre sur l’eau» ou DCE, établit un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau. Elle donne la priorité à la protection de l’environnement en demandant de veiller à la non dégradation des eaux et d’atteindre d’ici 2015 un bon état général aussi bien en surface qu’en profondeur.

La Commission européenne a décidé d’envoyer à la France un dernier avertissement (voir notre article précédent) au motif qu’elle n’a pas respecté un arrêt rendu en 2004 par la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) statuant sur le traitement des eaux urbaines résiduaires dans certaines zones sensibles. En mai 2007, la France a notifié à la Commission la situation des localités et son calendrier pour l’exécution de la décision. Il semble que certaines localités ne seront pas dotées d’équipements de traitement des eaux résiduaires avant 2011, soit sept ans après l’arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes, et douze ans après le délai fixé par la directive. La Commission juge ce retard déplorable et demande instamment à la France de construire, dans les plus brefs délais, des installations de traitement des eaux résiduaires dans toutes les localités concernées.

La Frapna avait tiré le signal

Mais qu’il s’agisse ou non de zones sensibles, de nombreuses régions françaises ont pris du retard en matière d’épuration des eaux résiduaires. En novembre 2006, la Frapna avait tiré la sonnette d’alarme sur la situation en Rhône-Alpes, inventoriant 30 points où les stations d’épuration (STEP), sous la responsabilité de collectivités locales, ne respectent pas la réglementation sur la pollution des eaux et nuisent à l’environnement:

“Mais la situation en Rhône-Alpes laisse craindre le pire. Seules 30% des « masses d’eau » atteindront certainement le bon état écologique exigé par la Directive Cadre Européenne sur l’Eau (DCE). Le premier SAGE (schéma d’aménagement et de gestion des eaux) de France a été approuvé en 1997 (la Drôme) mais à ce jour, seulement deux autres SAGE ont été approuvés en Rhône-Alpes (Basse Vallée de l’Ain en 2003, et Haut Drac en 2006). Ainsi, moins de 10% du territoire rhônalpin sont couverts. De plus, à de nombreux endroits les SAGE sont bloqués ou pataugent. Certains élus locaux, qui ont une vision à court terme, perçoivent la gestion de l’eau comme un obstacle au développement de leur commune. Alors que l’enjeu est de garantir des ressources pour un développement économique durable et pour la qualité de vie de demain. Inversement, les élus locaux qui souhaitent s’engager dans une démarche SAGE ne sont pas épaulés de façon adéquate par les administrations”.

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La récente STEP du Touvet (18 000 EH)

Une station d’épuration, c’est quoi ?
Une station d’épuration est une usine de dépollution des eaux usées avant leur rejet au milieu naturel, en général dans une rivière.
Les eaux résiduaires sont collectées dans les réseaux d’assainissement qui permettent leur écoulement jusqu’à la station d’épuration. Ce sont: eaux ménagères provenant des cuisines et du lavage, contenant essentiellement des matières organiques (graisse, protéines) et des produits chimiques (produits d’entretien, détergents,…), eaux-vannes provenant des sanitaires et contenant des matières organiques biodégradables et des micro-organismes, eaux pluviales, lorsque le réseau d’assainissement est de type unitaire, qui véhiculent des matières végétales (feuilles, branches, …) ou minérales (sables) , eaux résiduaires industrielles, dont la nature est compatible avec le traitement assuré par la station d’épuration (c’est à dire notamment biodégradables et non toxiques)

Qu’en est-il en Isère?

Même si la récente Conférence départementale de l’eau (20 décembre 2007 à Grenoble) – avec à l’appui la signature d’une charte et la création d’un observatoire de l’eau (ode38) – a tenté de “resserrer les boulons” et exprimé la volonté collective d’encourager les efforts entrepris pour une gestion partagée, équitable et durable de la ressource eau, on ne peut pas dire que l’Isère soit en avance sur la question de l’épuration des eaux. La Frapna n’hésite pas à dire que l’Isère patauge, comme la plupart des départements rhônalpins. “Il y a trop de problèmes de collecte des eaux usées. La DDAF est désarmée pour agir”, note t-elle.

Lors de cette conférence départementale de l’Eau, Christian Nucci, vice-président du Conseil général de l’Isère chargé de l’Agriculture, du Développement rural et de l’Eau, reconnaissait qu’en 2015, la moitié seulement des masses d’eau de l’Isère seraient en bon état. Il évoquait le nombre de 15 projets identifiés pour un investissement d’environ 100 millions d’euros.

Le préfet, pour sa part, a rappelé à cette occasion qu’il avait mis en demeure 13 collectivités locales lors du dernier congrès des maires de l’Isère (Estrablin 2007). On arrive au nombre de 16 mises en demeure puisqu’auparavant ont subi le même sort:

– le syndicat Intercommunal d’Assainissement de la Jonche qui siège à la Mure : dépôt d’un dossier de demande d’autorisation de son système d’assainissement répondant aux prescriptions des arrêtés du 22 décembre 1994 au plus tard le 30 novembre 2007. Ils doivent prévoir des travaux dans les meilleurs délais et au plus tard le 30 septembre 2009
– le système d’assainissement du Syndicat Intercommunal d’Assainissement d’Izeaux-Sillans : 2350 EH, non respect de la Directive : mise en œuvre d’un traitement biologique avec décantation secondaire ou un traitement ayant un pouvoir épuratoire équivalent de ses eaux usées au plus tard le 31 décembre 2005, mise en conformité avec la réalisation des travaux au plus tard le 31 décembre 2008, dépôt de son dossier avant le 30 septembre 2007
– Le Rival : STEP en surcharge, ne respecte pas les normes européennes et a un fort impact sur le milieu naturel sur la rivière Rival.

Pour mémoire, la Frapna en 2006 avait attiré l’attention sur un certain nombre de STEP:

-Vercors: Autrans, Corrençon-en-Vercors, Méaudre

-Matheysine et Oisans: La Mure, Les Deux-Alpes, l’Alpe d’Huez

-Trièves: Mens et Clelles

-Nord Isère: La Tour du Pin, Charavines, Apprieu, Colombe, Réaumont, Saint-Blaise-du Buis, plus le problème des STEP autour de la rivière Fure, Bourbre et Gère.

Il faut préciser qu’à chaque fois, ce sont des opérations financièrement lourdes devant lesquelles les collectivités locales hésitent. Le programme de travaux de rénovation engagé, par exemple, par Villard-de-Lans (plus de 10 000 Equivalents Habitants), s’élève à 15 millions de francs.

Gilbert

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