Crise du lait: la Cour des comptes européenne donne son avis

Dans un communiqué publié hier, la Cour des comptes européenne  présente une synthèse du rapport spécial intitulé «Les instruments de gestion du marché du lait et des produits laitiers ont-ils atteint leurs principaux objectifs?”, rapport qu’elle a adopté. Celui-ci est disponible sur le site Internet de la Cour (http://www.eca.europa.eu). Voici la teneur de la synthèse de la Cour des comptes européenne:

Le lait occupe une place majeure dans l’économie agricole de l’Union européenne. Plus d’un million de producteurs fournissent annuellement 148 millions de tonnes de lait, pour une valeur de 41 milliards d’euros au départ des exploitations. La transformation du lait (principalement la fabrication de fromages, de beurre et de lait de consommation) occupe environ 400 000 personnes et génère un chiffre d’affaires de 120 milliards d’euros.
Dans ce rapport spécial, la Cour des comptes européenne examine l’efficacité de la gestion, par la Commission européenne, du marché du lait et des produits laitiers depuis l’instauration des quotas laitiers en 1984 au regard des principaux objectifs assignés à la politique laitière de l’UE. La Cour relève également les points les plus critiques à prendre en considération dans le processus de dérégulation progressive du secteur laitier engagé depuis 2003.
La politique laitière de l’UE vise à réaliser une gamme étendue d’objectifs quelque peu contradictoires, notamment à équilibrer le marché, stabiliser les prix du lait et des produits laitiers, assurer un niveau de vie équitable aux producteurs et améliorer la compétitivité des produits laitiers européens. La Cour analyse le degré de réalisation de ces objectifs, attire l’attention sur les éléments de fait critiques et adresse une série de recommandations à la Commission européenne sur la base des données disponibles fin 2008.
S’agissant de l’équilibre du marché, la Cour conclut que les quotas laitiers ont limité efficacement la production, mais que leur niveau s’est avéré longtemps trop élevé par rapport aux capacités du marché à absorber les excédents.
La Cour recommande de continuer à superviser l’évolution du marché du lait et des produits laitiers pour éviter que la libéralisation du secteur ne conduise à la réapparition d’une situation de surproduction. À défaut, l’objectif de la Commission de s’en tenir à un niveau de régulation minimal, du type filet de sécurité, pourrait rapidement s’avérer impossible à respecter.
Par rapport à l’objectif de stabiliser les prix, la Cour constate que le prix nominal du lait à la production a peu varié durant la période 1984-2006, comparativement à la période ayant précédé l’instauration des quotas. En revanche, en monnaie constante, le prix du lait à la production a connu une érosion continue depuis 1984. Le prix du lait à la production et le prix du lait à la consommation n’évoluent pas en parallèle, car ils subissent l’influence de paramètres différents.

La Cour recommande que le processus de formation des prix dans le domaine alimentaire soit l’objet d’un suivi régulier par la Commission. La concentration des entreprises de transformation et de distribution ne doit pas placer les producteurs de lait dans une situation de preneurs de prix (price takers), et ne doit pas limiter la possibilité pour les consommateurs finals de bénéficier équitablement des baisses de prix.
Eu égard à l’objectif consistant à assurer un niveau de vie équitable aux producteurs, la Cour constate que le revenu moyen des producteurs de lait est resté légèrement supérieur au revenu agricole moyen. Cependant, si le revenu statistique moyen des producteurs de lait a pu se maintenir, voire augmenter, cela est dû à différentes raisons, notamment une productivité plus élevée, une part croissante des aides dans le revenu des producteurs et la diminution constante du nombre d’exploitations.

L’EU-15 a perdu la moitié de ses exploitations laitières entre 1995 et 2007; plus de 500 000 producteurs ont cessé leur activité durant cette période. Cette tendance à la consolidation de la production devrait se poursuivre, voire s’accélérer, dès lors que les zones les moins favorisées connaissent une régression ou une disparition de la production et qu’une concentration de la production est observée dans les zones d’agriculture intensive.
Il conviendrait d’approfondir la réflexion sur les stratégies à mettre en oeuvre pour faire face à la fois aux problèmes spécifiques des régions dans lesquelles la production laitière est vulnérable, notamment les zones montagneuses, et aux conséquences environnementales de la concentration géographique de la production laitière.
S’agissant de l’objectif de compétitivité, la Cour constate que la part de l’UE dans le commerce mondial des produits laitiers se contracte depuis 1984. Les producteurs européens de produits laitiers de base (beurre et lait en poudre) ne sont concurrentiels sur les marchés mondiaux que quand les cours sont élevés. Pour ces produits, le marché mondial restera un marché secondaire. Seuls les producteurs de fromages et d’autres produits à haute valeur ajoutée pourront revendiquer des parts de marché durables.
En conséquence, il incombe à la Commission et aux États membres d’orienter en priorité leurs efforts vers la satisfaction des besoins du marché domestique européen et, complémentairement, vers la production de fromages et d’autres produits à haute valeur ajoutée exportables sans aides budgétaires.

Gilbert

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