Avec plus de 17 000 emplois, la filière viande en Rhône-Alpes est plus spécialisée sur ses segments en aval.
Placée au 5e rang des régions françaises pour l’importance de l’ensemble de la filière, mais elle se situe au 3e pour le seul segment du commerce de gros. Le niveau d’exportation d’animaux vivants est également significatif. L’ensemble de la filière est davantage présent dans l’ouest de la région, à proximité de l’Auvergne et du Charolais.
Ces territoires accueillent en particulier de grandes unités d’abattage et de transformation de la viande.
La filière viande rassemble tous les établissements impliqués de manière significative dans la production de viandes ou de produits à base de viande, et ce quelle que soit leur place dans la chaîne de production. La filière se compose ainsi, d’amont en aval, de trois segments d’activités : l’élevage (principalement bovins, ovins-caprins, volailles, porcins), l’abattage-transformation de la viande et le commerce de gros.
Rhône-Alpes : 5e région française pour l’emploi dans la filière
En Rhône-Alpes, la filière viande compte près de 7 000 établissements, dont 6 000 exploitations agricoles. Elle occupe 17 300 personnes en 2011, ce qui correspond à environ 7 % du total national. L’effectif de Rhône-Alpes place la région au 5e rang des régions françaises, loin derrière la Bretagne et les Pays de la Loire, deux régions spécialisées dans le secteur de l’agro-alimentaire et regroupant chacune près de 40 000 emplois. La filière ne regroupe par ailleurs que 0,6 % des emplois régionaux. Cette part est de 0,9 % en France métropolitaine ; elle est très élevée dans les régions du Massif central, en particulier dans le Limousin, où 4,1 % des emplois sont liés aux activités de production de viande.
En général, les régions spécialisées dans la viande affichent une part des segments élevage et abattage-transformation plus importante qu’ailleurs. De son côté, Rhône-Alpes se distingue par une structure de l’emploi davantage orientée vers l’aval de la filière, le commerce de gros en particulier.
Une part importante de non-salariés, essentiellement dans l’agriculture
Selon les régions, la répartition de l’emploi entre les segments de l’élevage, de l’abattage-transformation et du commerce de gros peut varier sensiblement. La continuité de la chaîne productive de la filière sur une même zone géographique n’est pas toujours observée : ce n’est pas forcément l’élevage local qui fournit aux établissements industriels de la zone la matière première servant à la production de viande. Les échanges inter-régionaux, voire internationaux, sont fréquents. Par exemple, une partie des transformateurs régionaux peuvent se fournir en porcs provenant de Bretagne ou d’Espagne.
De même, l’engraissement de « broutards » peut s’effectuer en Italie. Le commerce de gros n’est pas, lui non plus, nécessairement implanté dans les régions d’élevage ou de production ; il peut se trouver à proximité des lieux de consommation ou des nœuds de communication comme l’Île-de-France.
Les caractéristiques de l’emploi dans la filière rhônalpine restent par ailleurs assez proches de celles constatées au niveau national. Les nombreux établissements du segment agricole de l’élevage sont naturellement constitués d’importants effectifs non-salariés. Ce statut particulier concerne environ 6 200 personnes dans la région, soit une part de 36 % de l’emploi total de la filière (contre 13 % pour l’emploi tous secteurs d’activité confondus).
Les femmes, même si elles représentent un tiers de l’emploi de la filière, sont moins présentes que sur l’ensemble des secteurs économiques (47 % en Rhône-Alpes). Les jeunes travailleurs sont également moins nombreux : la filière compte 42 % de travailleurs âgés de moins de 40 ans ; tous secteurs confondus, cette part est supérieure de 6 points.
En Rhône-Alpes, la spécialisation plus forte en aval de la filière explique des niveaux de salaires plutôt élevés. La rémunération annuelle nette y atteint 23 200 euros, soit 400 euros supplémentaires, en moyenne, par rapport à la filière viande en France métropolitaine. Avec
plus de 24 500 euros, les départements de la Loire et de la Haute-Savoie occupent les deux premières places de la région ; la Drôme et l’Ardèche, où les salaires sont inférieurs à 21 500 euros, ferment la marche.
Les effectifs de la filière dans la région se concentrent autour de Lyon, Roanne, Mâcon et Saint-Étienne
Au sein de la région, la présence de la filière viande est très marquée sur un large espace géographique s’étirant de la plaine du Forez jusqu’au plateau de la Dombes et le pays bressan. Cette présence se retrouve également au sud, autour de Valence et le long du couloir rhodanien, avec la transformation de la viande de volailles.
L’élevage : surtout des bovins…mais aussi des ovins, des porcs et de la volaille
Le segment de l’élevage constitue le premier maillon de la filière. En Rhône-Alpes, ce segment regroupe 6 500 emplois en 2011. Par rapport aux régions les plus spécialisées telles que le Limousin, l’Auvergne, Midi-Pyrénées ou la Bourgogne, ce segment est relativement peu développé en Rhône-Alpes. Il regroupe 37 % des emplois régionaux de la filière, une part inférieure aux 45 % du niveau national. Même si l’élevage bovin représente l’essentiel des élevages d’animaux, les régions se différencient les unes des autres en fonction de l’orientation de leurs élevages.
L’élevage porcin reste une spécialité bretonne. La volaille, quant à elle, est caractéristique de toutes les régions de la façade ouest, des Pays de la Loire en premier chef. Enfin, les régions du sud de la France sont davantage tournées vers l’élevage d’ovins-caprins. L’élevage rhônalpin ne présente pas de spécialisation marquée. La présence des élevages de porcs ou de volailles est limitée, sans commune mesure avec la concentration de ces activités en Bretagne et en Pays de la Loire.
L’élevage de bovins domine en amont de la filière
Sur ce segment, les non-salariés représentent la grande majorité des emplois. Les exploitations agricoles sont nombreuses et se caractérisent en effet par une très faible présence du salariat : 94 % d’entre elles sont non-employeuses. Les plus grands établissements se trouvent dans l’aviculture.
Avec un âge moyen de 46 ans, les éleveurs sont relativement âgés : 40 % d’entre eux ont plus de 50 ans. À l’inverse, les salariés de l’élevage sont plus jeunes, leur âge moyen atteint 35 ans (contre 36 ans au niveau national) ; un quart d’entre eux seulement a plus de 50 ans. Sur ce segment de la filière, le salariat semble concourir à la transmission de l’entreprise dans un cadre familial. Les éleveurs enfants d’éleveurs représentent une part importante des salariés âgés de moins de 25 ans (comme au niveau national d’ailleurs où cette part est de 23 %). Enfin, les femmes n’occupent que 27 % des emplois du segment.
L’abattage-transformation : un segment industriel…
Dans l’abattage et la transformation, les caractéristiques de l’emploi sont celles de l’industrie et contrastent fortement avec celles de l’agriculture.
Ce segment regroupe 47 % de l’emploi régional de la filière, une proportion similaire au niveau national. Il rassemble 360 établissements et 8 100 salariés et s’appuie sur des établissements de grande taille. Ainsi, les dix premiers établissements réunissent un tiers des effectifs salariés du segment. Pour la plupart, ils se situent dans la Loire et le long du couloir rhodanien. L’abattage et la transformation de la viande se retrouvent également aux franges de la région Rhône-Alpes, avec de grandes unités de production comme l’abattoir de bovins de l’entreprise « Bigard » à Cuiseaux (en Bourgogne), l’abattoir de porcs « Tradival » à Lapalisse (en Auvergne) ou l’abattoir municipal d’ovins à Sisteron (en Paca).
De 2008 à 2011, la baisse de – 9 % de l’emploi salarié dans l’ensemble de la filière régionale est trois fois plus importante que celle constatée au niveau national. Le segment de l’abattage-transformation y contribue pour une large part. Dans un contexte de faible niveau d’activité (baisse de la consommation de viande par habitant, concurrence des pays étrangers, baisse du cheptel des animaux de boucherie, …) ces pertes d’emplois s’accompagnent d’un mouvement de concentration et de rationalisation des outils de production. Le taux d’investissement de 16 % des entreprises de la région (14 % en France métropolitaine) témoigne des efforts engagés pour préserver une rentabilité déjà faible.
L’abattage-transformation marqué par la présence de grands groupes agro-alimentaires
Comme pour l’ensemble des industries alimentaires, le segment de l’abattage-transformation est marqué par la présence de grands groupes. En Rhône-Alpes, ces derniers sont cependant moins dominants qu’ailleurs : 78 % des salariés de l’abattage-transformation travaillent dans un établissement contrôlé par un groupe, contre 85 % en France métropolitaine. Cette proportion est bien plus faible que dans les Pays de la Loire ou en Bretagne, régions où les groupes sont omniprésents sur ce segment.
Le poids des groupes étrangers est, quant à lui, nettement plus important en Rhône-Alpes : près de 1 900 salariés, soit un quart des effectifs du segment, travaille dans un établissement sous contrôle étranger (contre 9 % seulement en France métropolitaine). Ces groupes, essentiellement espagnols et suisses, détiennent en effet les plus grands établissements du segment industriel de la filière rhônalpine. À titre d’exemples, le fabricant de jambon « Aoste » dans l’Isère qui compte plus de 500 salariés et les établissements « Cochonou » et « Justin Bridou » dans les Monts du Lyonnais et le Pilat dépendent tous les trois du même groupe espagnol « Campofrio Food », lequel contrôle à lui seul près de 1 200 salariés en Rhône-Alpes.
Les plus gros établissements dans le nord-ouest de la région
En parallèle, 3 700 salariés du segment, soit près d’un salarié sur deux, dépendent d’un groupe français. Les établissements sont ici de taille plus modeste. Le groupe « Terrena » est le plus important ; ses 350 salariés sont notamment répartis dans les établissements « Bernard Royal Dauphiné ».
Le commerce de gros plus développé en Rhône-Alpes
Le commerce de gros, qui joue un rôle stratégique dans la distribution des produits carnés, se compose de deux activités : d’une part, le commerce de gros d’animaux vivants, d’autre part celui des carcasses et des produits à base de viande conditionnée ou transformée.
Le segment du commerce de gros est développé en Rhône-Alpes. Il rassemble 2 300 salariés, ce qui en fait la 3e région de France métropolitaine. Ce segment concentre 15 % des emplois de la filière, soit une proportion bien supérieure aux 9 % du niveau national. La proximité d’axes de communication majeurs et de grands bassins de population, la tradition commerçante de Rhône-Alpes, voilà autant d’éléments qui participent significativement à la surreprésentation du commerce de gros dans la filière régionale (par rapport au niveau national).
Exemple de la relative déconnexion des trois segments de la filière au niveau local, c’est l’Île-de-France qui se place en tête des régions pour le commerce de gros de la filière viande (plus de 3 000 salariés).
La qualification de l’emploi est ici plus élevée : les cadres et professions intermédiaires représentent près d’un quart des salariés, soit davantage que sur l’ensemble de la filière où le taux d’encadrement n’est que de 11 %. Les rémunérations sont donc plus élevées avec des salaires moyens de 25 200 euros net par an contre 23 000 euros dans l’abattage-transformation et moins de 18 000 euros seulement dans l’élevage. Cet avantage salarial sur les autres segments s’accentue avec l’âge des salariés.
L’importance du commerce de gros d’animaux vivants dans la région se traduit par un chiffre d’affaires à l’export de 477 millions d’euros et un taux d’exportation de près de 30 % contre 11 % au niveau national. Les éleveurs-naisseurs peuvent en effet choisir de vendre leurs « broutards » (jeune bovin mâle) à des entreprises assurant le transfert des animaux vers d’autres pays, comme l’Italie, spécialisés dans l’engraissement des animaux.
Ce créneau d’activité particulier est dominé par deux entreprises : « Deltagro Union » basée à Roanne et faisant partie du groupement coopératif de la Sicarev et « Eurofrance » à Lentilly.
Un segment plus exportateur en Rhône-Alpes
La plupart des résultats financiers de la filière rhônalpine se situent dans la moyenne nationale. En 2011 et en aval de la filière (abattage-transformation et commerce de gros), la valeur ajoutée des entreprises implantées en Rhône-Alpes s’élève à près de 440 millions d’euros. Les trois quarts de cette valeur ajoutée sont réalisés par le seul segment de l’abattage-transformation.
Rapporté au chiffre d’affaires, le taux de valeur ajoutée s’élève à 11,9 %, en baisse continue depuis 2008 (13,1 %). Il reflète les difficultés économiques de ces entreprises : hausse de leurs charges en matière première, baisse des volumes traités, vive concurrence, resserrement de leurs marges … Grâce au commerce de gros, la région se démarque néanmoins par un taux d’exportation s’élevant à 16 % contre à peine 11,7 % en moyenne sur l’ensemble du territoire national.
L’élevage laitier et son impact sur la filière viande
À côté des 170 000 vaches allaitantes de la filière viande, Rhône-Alpes compte un cheptel de 269 000 vaches laitières. Le lait constitue, avec environ 14 000
emplois, une filière d’ampleur équivalente à celle de la viande. La filière viande dépend partiellement de l’élevage laitier : en effet, les veaux issus de vaches laitières, ainsi que les vaches elles-mêmes lorsqu’elles sont réformées après leur période de production de lait, approvisionnent les unités d’abattage et de transformation de la viande. En Rhône-Alpes, près de 50 % de la production totale de viande bovine provient ainsi de races laitières.La spécialisation économique des territoires dans la filière viande ou la filière lait dépend de la répartition géographique entre bovins à viande et vaches laitières. Plus proches du bassin allaitant du Charolais, la zone d’emploi de Roanne s’oriente en direction de la filière viande avec 1 500 emplois. À l’inverse, les alpages à l’est de la région expliquent la présence de la filière laitière dans les zones d’emploi d’Annecy ou du Genevois Français (avec respectivement 1 500 et 1 000 emplois). Enfin, et malgré des effectifs plus faibles au sein de la filière laitière, les zones d’emploi de Mâcon et de Bourg-en-Bresse se singularisent par une double spécialisation, à la fois dans le lait et dans la viande.
En bout de chaîne, le commerce de détail de la viande
Les effectifs comptabilisés dans le commerce de détail ne sont pas intégrés à ceux de la filière viande. Localisés selon une logique de proximité avec les consommateurs, les réseaux de vente au détail de la viande ou des produits à base de viande utilisent deux canaux de distribution : le commerce artisanal (boucheries et charcuteries) et la grande distribution.
En Rhône-Alpes, le commerce artisanal est plus développé qu’au niveau national. Environ 2 100 salariés exercent des métiers en lien direct avec la viande au sein de la grande distribution alors qu’ils sont 3 200 dans le commerce artisanal. La profession de boucher est évidemment la première concernée : 1 600 bouchers travaillent dans chacun de ces deux canaux de distribution, soit 3 200 au total.
Dans le commerce artisanal, en plus des métiers directement liés à la viande, on compte aussi 2 900 emplois de vendeurs et environ 1 300 non-salariés. Au total, on peut ainsi estimer l’emploi dans le commerce de détail de la viande à au moins 9 500 postes de travail*.
* Cette estimation ne tient pas compte des emplois de vendeurs dédiés aux rayons boucherie et charcuterie de la grande distribution.
Source Insee